Regards croisés Jean-Paul Faugère, président du conseil d’administration et Frédéric Lavenir, directeur général

Les résultats 2014 viennent d’être présentés aux actionnaires, que peut-on en dire ?

Frédéric Lavenir - Ils sont bons. Nos revenus totaux sont en croissance de 3,2 %, le résultat net atteint 1 080 M€, en progression de 4,8 %, dans un environnement pourtant peu favorable. 2014 est à la fois une année de performance économique et de transformation. La croissance de l’activité en unités de compte et celle des métiers de protection de la personne reflètent la mise en œuvre des orientations stratégiques engagées dès 2013. La forte dynamique de revenus se poursuit au Brésil, qui contribue lui aussi au rééquilibrage vers les métiers les plus créateurs de valeur.

Jean-Paul Faugère - Le conseil d’administration a marqué sa satisfaction envers le management et toutes les équipes de CNP Assurances pour la qualité de ces résultats. Et tous les administrateurs ont salué l’inflexion du modèle d’affaires en faveur de la rentabilité, avec le support de nos réseaux partenaires.

Le contexte de taux bas est un défi lancé aux assureurs. Comment CNP Assurances se positionne-t-elle ?

Frédéric Lavenir - La baisse des taux que nous avons connue en 2014 a été d’une ampleur inédite. Nous avions en tout état de cause d’ores et déjà commencé de nous adapter à un environnement de taux très bas, dont nous anticipons la prolongation assez durable. Ainsi, nous avons fait évoluer notre politique d’investissement et à nouveau renforcé notre provision pour participation aux excédents. Plus structurellement, nous entendons poursuivre et accentuer notre mouvement de diversification stratégique, que ce soit à travers l’évolution de nos partenariats ou à travers celle de nos produits. à cet égard, nous sommes convaincus que l’avenir du métier d’épargne repose sur le développement de produits à horizon très long, qui correspondent de plus en plus aux attentes des clients. C’est pourquoi nous nous sommes fortement mobilisés sur le lancement du produit Eurocroissance, qui est aujourd’hui opérationnel.

Jean-Paul Faugère - CNP Assurances, en tant que gestionnaire de l’épargne de millions de clients, en particulier en France, ressent la gravité du défi que vous évoquez. Notre engagement est de leur garantir d’abord la sécurité et ensuite un rendement convenable au regard de l’inflation. Nous tenons ces deux objectifs. La qualité technique des professionnels du groupe CNP Assurances, en actuariat comme en gestion financière, est une composante essentielle de notre marque. Et la perspective très longue dans laquelle nous nous inscrivons nous oblige à la vigilance et à la prudence. Les épargnants qui nous font confiance savent l’importance de ces valeurs chez CNP Assurances.

Vos accords de partenariat en bancassurance avec La Banque Postale et BPCE sont en cours de renouvellement, où en êtes-vous ?

Frédéric Lavenir - L’accord de partenariat avec le Groupe BPCE a été renouvelé pour une première période de sept ans à compter de 2016. Il est centré sur les activités de protection, avec de fortes perspectives de développement en assurance emprunteur grâce à une distribution élargie à l’ensemble des réseaux du Groupe BPCE, incluant Banque Populaire et Crédit Foncier, ainsi qu’en prévoyance et santé collectives : il contribuera ainsi, dès 2016, à notre stratégie de diversification. Du côté de La Banque Postale, le succès exceptionnel de la gamme Cachemire a d’ores et déjà donné une impulsion nouvelle à notre partenariat. Les discussions progressent autour d’une ambition commune de développement.

Jean-Paul Faugère - BPCE continuera à être un grand partenaire de CNP Assurances en France, même si progressivement le contenu de ce partenariat évoluera. La négociation a été conclue par le management dans des conditions très constructives, et je vois bien la qualité du climat de coopération entre les équipes. BPCE a d’ailleurs réaffirmé sa volonté de demeurer un actionnaire stable de notre société. Avec La Banque Postale, je ne doute pas que nous aurons prochainement un accord, et j’ai toutes les raisons de croire que le groupe CNP Assurances s’inscrira, par cet accord, dans la logique de croissance souhaitée à la fois par La Banque Postale et par la Caisse des Dépôts.

Lorsque vous parlez de développement de la protection, concrètement de quoi s’agit-il ?

Frédéric Lavenir - Je parle bien sûr de la prévoyance au sens traditionnel mais aussi, par exemple, de la santé, de l’assurance des emprunteurs, voire, au Brésil, de l’assurance automobile et habitation. La transition démographique en Europe, l’émergence de la classe moyenne en Amérique du Sud en font des métiers à fort potentiel de croissance sur le long terme – mais aussi des métiers en transformation, où l’innovation est possible et nécessaire et permet de dégager des marges plus élevées que sur les produits d’épargne banalisés.

La généralisation de la complémentaire santé à l’ensemble des entreprises va profondément bousculer le monde de la protection sociale en France. Quel rôle le Groupe entend jouer ?

Frédéric Lavenir - C’est un vrai défi, et nous y engageons tous nos atouts et nos savoir-faire : notre modèle multipartenarial, nos plateformes multicanales, notre capacité à concevoir une offre santé simple, avec des services en inclusion et des garanties en option. La distribution de proximité, indispensable pour gagner la confiance d’un dirigeant de PME, nous incite à nous appuyer d’abord sur nos partenaires, en leur offrant l’appui technique et opérationnel de notre réseau salarié ; en même temps la distribution en nombre nous fait parier sur la digitalisation. Nous sommes ambitieux, avec les moyens de l’être, notamment grâce à notre réseau Amétis et à notre nouveau partenariat avec Alptis.

Le partenariat avec Santander renforce la présence européenne de CNP Assurances. En quoi s’inscrit-il dans vos orientations stratégiques ?

Frédéric Lavenir - Il illustre à lui seul trois de nos orientations stratégiques. La première, c’est la valorisation de notre savoir-faire de bancassureur multi­partenarial ; la deuxième, c’est le développement sur les métiers de protection, auxquels ce nouveau partenariat est consacré à 100 % ; la troisième, c’est l’ambition euro­péenne : nous couvrons dix pays d’Europe avec notamment une forte présence en Allemagne, dont nous étions absents jusqu’à présent. C’est une formidable opportunité pour CNP Assurances.

Jean-Paul Faugère - C’est évidemment un succès pour CNP Assurances. Le fait que Santander nous ait choisis comme partenaire en Europe dans un contexte concurrentiel très aigu témoigne de la qualité de notre offre. Les équipes de CNP Assurances se sont montrées particulièrement offensives et professionnelles dans cette affaire. Le conseil d’administration aura à cœur de suivre les résultats de cet investissement. Mais je peux témoigner qu’il l’a accueilli avec un intérêt particulier. Compte tenu de la fin de notre partenariat avec Barclays en Espagne, qui était principalement centré sur les activités d’épargne, la conclusion du partenariat avec Santander illustre bien notre capacité à poursuivre notre développement européen tout en le recentrant sur les métiers de protection.

La croissance brésilienne ralentit, mais pas l’ambition de CNP Assurances ?

Frédéric Lavenir - 2014 a été une année particulière au Brésil, avec la Coupe du monde de football et l’élection présidentielle. Reste que Caixa Seguradora a poursuivi sa croissance, avec notamment une magnifique performance sur les activités de protection, dont le revenu, en croissance de 21,7 % (à périmètre et change constants), représente désormais les 4/5 du revenu total de notre filiale. Au vu de ces résultats et du potentiel de la zone, nous continuons d’être extrêmement confiants sur nos perspectives à court comme à long terme en Amérique du Sud.

Quelles sont vos orientations en matière d’investissements ? Quelle place pour les actions ou l’immobilier ?

Jean-Paul Faugère - Notre politique de placement fera davantage de place aux actions et à l’immobilier, voire aux infrastructures, pour d’évidentes considérations de rendement, le niveau des taux des obligations, en particulier publiques, étant désormais très en deçà des rémunérations attendues de nos clients. Nous avons d’ailleurs traditionnellement une position plutôt plus engagée que nos concurrents sur ces classes d’actifs, pour deux raisons : d’une part, nous gérons des portefeuilles d’épargne et de retraite d’une duration très longue ; d’autre part, nous sommes convaincus que c’est la bonne stratégie d’investissement dans le contexte de taux actuel. Et nous sommes très à l’aise avec ces choix, car nous croyons à notre vocation d’investisseur institutionnel, en particulier en raison de notre appartenance au secteur public. En conséquence, il est heureux que nous puissions participer au financement de l’économie réelle. Ainsi, par exemple, en 2014, CNP Assurances a engagé 740 M€ en titres non cotés en private equity. à travers notre participation au programme France Investissement Assurance, nous avons contribué à l’émergence et à la croissance de plus de 250 PME innovantes.

Comment se présente 2015 ?

Jean-Paul Faugère - Notre objectif de conforter notre modèle d’affaires avec nos grands partenaires en France sera tenu ; la diversification de notre offre en France et en Europe sera amorcée au bénéfice de la rentabilité future ; le contexte brésilien demeure dynamique et prometteur.

Le conseil d’administration veillera bien sûr à la mise en place des normes prévues par la directive Solvabilité 2, qui s’appliquera à partir du 1er janvier 2016. C’est un gros travail. Il aura le mérite, en particulier, de garantir une quantification transparente de nos différentes catégories de risques.

Frédéric Lavenir - L’année 2015 est résolument placée sous le signe de l’innovation. Nous avons lancé en février notre contrat haut de gamme CNP One et notre premier contrat Eurocroissance. Nous avons de nombreux projets dans le domaine des services. 2015 doit également être l’année de l’affirmation de notre ambition digitale. Nous avons d’ores et déjà décidé la création, en 2016, d’une compagnie 100 % digitale au Brésil. Un chief digital officer pilotera à mes côtés la transformation digitale du groupe CNP Assurances, résolument en mouvement. 

Verbatim

« Notre engagement est de garantir d’abord la sécurité de l’épargne des millions de clients, en particulier en France, qui nous font confiance. »

Jean-Paul Faugère

« Nos bonnes performances 2014 attestent la robustesse de notre modèle, la pertinence de notre stratégie et l’engagement des équipes dans la transformation de CNP Assurances. »

Frédéric Lavenir

« En 2014, le groupe CNP Assurances a contribué à l’émergence et à la croissance de 250 PME innovantes. »

Jean-Paul Faugère

« 2015 est résolument placée sous le signe de l’innovation, avec de nombreux projets dans le domaine des services, et l’affirmation de notre ambition digitale. »

Frédéric Lavenir